Premier texte de l’année 3 (2018) pour la collection UHL, Issa Elohim propose d’aborder un sujet majeur de l’actualité : la crise migratoire. L’onirisme et les croyances sont aussi au menu. J’ai beaucoup aimé ce texte et je vous explique pourquoi.

4ème de couverture

Europe. Demain.

Dérèglements climatiques, terrorisme et guerres confessionnelles secouent les restes d’un ordre mondial en miettes et jettent des millions de réfugiés sur les routes. L’horizon est fluctuant ; le monde se recroqueville face à un futur incertain et menaçant. Et puis il y a les Elohim — ou prétendus tels. Des êtres exceptionnels, mystérieux, porteurs d’un espoir nouveau, et qui semblent s’incarner sur Terre de manière aléatoire.

Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Que sont-ils ?

Valentine Ziegler est pigiste. Lorsque, depuis sa Suisse natale aussi préservée que sécurisée, elle entend parler de la présence possible d’un de ces êtres dans un camp de réfugiés tunisien géré par l’agence européenne Frontex, elle auto-finance en hâte son voyage dans l’espoir d’un reportage digne d’intérêt. Valentine est toutefois très loin d’imaginer au devant de quoi elle se précipite, l’étendue de la révolution à laquelle elle va se mesurer. Une possible épiphanie à même de changer sa vision du monde, si ce n’est le monde tout entier…

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Avant-propos peut-être, parce que le hasard fait bien les choses. Dimanche dernier, le 15 mai, la population suisse (dont je fais partie) était appelée à voter si elle voulait mettre plus de fonds et personnel à disposition de Frontex. Cette même agence est largement évoquée dans le texte de Laurent Kloetzer, et je trouvais intéressant comme un hasard d’agenda tombait si bien. Par ailleurs, je pense que ça a rendu ma lecture encore plus immersive, ce sujet était celui qui m’a le plus divisée des trois proposés en cette journée électorale. (Et si le résultat vous intéresse, la population a décidé d’accepter à 71.48% cette initiative).

Issa Elohim, c’est l’histoire d’une journaliste suisse (encore un hasard), Valérie Ziegler qui va se rendre dans un camp de réfugiés Frontex situé en Tunisie. Ce voyage est motivé par l’envie d’écrire un dossier sur l’étrange apparition qui y a eu lieu, celle d’un Elohim. Elohim est le mot hébraïque pour désigner le Dieu (ou son pluriel) et porte donc une connotation forte, tout particulièrement dans un équilibre politique ou la polarisation se fait de plus en plus forte, et que les partis centristes cessent doucement d’exister. Issa, aussi, est un emprunt au lexique biblique, car c’est la traduction en arabe de « Jésus ». Rien qu’avec le titre de son texte, Laurent Kloetzer nous promet donc un texte qui va jouer avec les croyances de ses personnages, mais également venir titiller les nôtres.

Donc, Valérie se rend dans ce camp afin de pouvoir écrire et documenter cet étrange phénomène. Issa n’est cependant pas le premier Elohim apparu. Par ailleurs, ces êtres sont soutenus et vénérés par la secte d’Aion. Le public quant à lui oscille entre fascination, désintérêt et scepticisme. Les rencontres que Valérie va faire vont changer sa vie. Issa Elohim est-il un Dieu, un alien ou un prestidigitateur ?

Si on t’a joué un tour on t’a joué un tour merveilleux, payé au prix le plus cher : la disparition finale du magicien, pour maintenir l’illusion, pour qu’il ne soit plus jamais possible de la dissiper. Si ton garçon était un artiste, c’ était un artiste extraordinaire, un des plus grands qui soit.

En à peine 125 pages, l’auteur rappelle aussi les enjeux et l’importance de la thématique de la crise migratoire, tant par ses aspects politiques qu’humains, la balance qui fait souvent flancher la plupart des décisions de notre monde actuel. Et je trouve qu’il le fait avec beaucoup de grâce et de respect, nous présentant des personnages variés malgré les similitudes qui les unissent. Tout cela est enrobé dans un style poétique et onirique, tout en étant dynamique. J’ai aussi beaucoup apprécié les zones d’ombres laissées.

En résumé : Un très beau texte, actuel, qui aborde intelligemment la thématique de la crise migratoire, dans un onirisme poétique appréciable.

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Et vous, qu’en avez-vous pensé ?